M i l l e n n i u M Saison 3 virtuelle Française EPISODE 3sv07 : LES TREIZE QUÊTES D'ISIS Ecrit par Sullivan LePostec sullivanlp@gmail.com TEASER SEQUENCE 1 - GALVESTON, TEXAS - EXT. JOUR Le lieu s'affiche par une légende à l'écran : ''Galveston, Texas'' Plan général sur une toute petite bourgade de l'est du Texas, région assez humide en bordure de la Louisiane. C'est un petit village de campagne, plutôt sympathique. De la musique traditionnelle se fait entendre. Le PANORAMIQUE de la caméra nous fait découvrir un champ, juste en bordure du village. Des tentes champêtres y sont plantées, occupées par divers stands. SEQUENCE 2 - PRAIRIE DE LA KERMESSE - EXT. JOUR La caméra fait un plan sur l'entrée du champ. Une Banderole la surplombe sur laquelle on lit : ''237EME ANNIVERSAIRE DE LA FONDATION DE LA VILLE PAR LES FRERES GALVESTON'' Une petit fille d'environ cinq ans, BETH, manie maladroitement sa canne à pêche dans l'espoir d'attraper un des petits canards en plastique qui flottent sur l'eau. Son crochet vient soudain s'encastrer dans l'anse d'un des jouets, qui se soulève de l'eau. La petite fille redresse sa canne et tente d'attraper le petit objet qui virevolte au bout de la ligne. ANGLE sur une femme d'environ 40 ans, les traits tirés. Elle fixe le sol vaguement, son esprit à des années lumières de là. Il s'agit de SUE McINTYRE, la mère de BETH. La caméra tourne autour d'elle lentement, tandis que les sons de la fête sont mis en sourdine. C'est la petite voie aiguë de sa fille qui la ramène à la réalité en un battement de paupière. BETH Maman ! Maman, regardes ! Je l'ai pêché ! Un sourire forcé apparaît sur le visage de SUE. Elle passe froidement sa main dans les cheveux de sa fille. SUE (sans intonation) C'est bien, chérie. Un homme, CRAIG, s'approche d'elles... CRAIG (enthousiaste) Formidable, Beth ! Il prend la petite fille dans ses bras. Toute fière, elle agite le canard sous son nez. CRAIG Viens, on va choisir ton cadeau. Il jette un regard vers la mère, hésite un instant puis se penche vers elle, et lui chuchote à l'oreille de sorte que la petite ne l'entende pas. CRAIG (ferme mais amical) Il faut te réveiller, Sue. Que tu vives en zombie... ca ne le ramènera pas. Sue le regarde, visiblement touchée par cette remarque. Il s'éloigne avec la gamine en direction du stand. La caméra fait un TRAVELING ARRIERE qui isole Sue au milieu de la foule festive. Après quelques secondes, un HOMME passe directement devant le champ de la caméra. Celle-ci pivote et le suit de dos. Il nous entraîne hors du champ où est célébré cet anniversaire. Il bifurque derrière une maison. SEQUENCE 3 - PONT SUR LA RIVIERE - EXT JOUR Au premier plan, une canne à pêche, une vraie cette fois. L'homme s'approche. Nous le reconnaissons à ses vêtements, un jean marron et une chemise froissée dans les mêmes tons, car le plan fait qu'on ne voit pas son visage. La caméra pivote sur son axe pour nous montrer le visage du pêcheur, O'MALEY, un homme barbu dans la soixantaine. O'MALEY 'alut. L'HOMME (OFF) Bonjour. Le Pêcheur observe l'homme un moment, l'air de se demander ce qu'il peut bien lui vouloir. O'MALEY T'as jamais vu quelqu'un pêcher, gars ? L'HOMME (OFF) Vous mangez ce que vous pêchez ? O'Maley soulève le couvercle du seau à coté de lui, et révèle que la pêche a été bonne. O'MALEY Trois fois par semaine. Qu'est-ce que t'as ? T'as pris quelque chose ou quoi ? Un silence. L'HOMME (OFF) Vous vivez de ce que vous récupérez dans la rivière. Nous sommes toujours en gros plan sur le Pêcheur. Il y a un autre silence inconfortable, puis un bruit de froissement de vêtement. La main de l'Homme fait irruption dans le champ tandis qu'elle place un chiffon sur le visage d'O'Maley, qu'il maintient par ailleurs fermement. Le vieillard se débat un moment. Il lâche sa canne qui tombe dans la rivière. Puis, après que le somnifère ait eu le temps de faire effet, il devient totalement inerte. SEQUENCE 4 - UNE CAVE SOMBRE - INT. JOUR Seules quelques très rares raies de lumière viennent de l'extérieur. La cave est éclairée par un néon nu. Celui-ci éclaire crûment le visage inanimé du Pêcheur. La caméra se déporte vers son abdomen, ou une main ganté termine une incision au scalpel. La main repose le scalpel tâché de sang sur un plateau, où se trouvent d'autres outils de chirurgie basiques. La caméra filme un plan d'ensemble de la table et du tueur de dos, et s'en éloigne tandis que l'homme plonge ses mains dans le corps de sa victime, dont il écarte la peau... FONDU AU NOIR M i l l e n n i u M GARDER ESPOIR CROIRE AU FUTUR L'HEURE EST PROCHE ? "Une société d'athées inventerait aussitôt une religion." Honoré de Balzac (1799-1850) ACTE 1 SEQUENCE 5 - DOMICILE DU SHERIFF - SALON - INT. JOUR La pièce est confortable mais un peu dépouillée. L'Epouse du Shérif, JULIA BELFAYE est en pleine conversation avec le DOCTEUR JACOBS. Elle porte un tailleur beige foncé. Une tenue anonyme et passe-partout. Le Docteur porte un pantalon et une veste de costume sombres portés sur un t-shirt gris. DR. JACOBS On ne peut tout de même pas rester sans rien faire ! JULIA C'est pas ce que je dis. DR. JACOBS Alors, quoi ? JULIA Réfléchissons. Agir de manière inconséquente pourrait précipiter... DR. JACOBS Je ne resterai pas à assister à l'avortement de... Le bruit d'une porte qui s'ouvre et se referme l'a interrompu. Les visages du Docteur et de Julia se tournent vers la porte de la pièce, où ne tarde pas à apparaître le SHERIF MARTIN BELFAYE. Le visage très sombre, il s'affale dans un fauteuil sans vraiment regarder autour de lui, et passe sa main sur son visage. Puis, il semble se reprendre. SHERIF BELFAYE Excusez-moi, Docteur. Je ne vous ai même pas dit bonjour. DR. JACOBS Visiblement, c'est aussi horrible que les bruits qui circulent. Le Shérif fait non de la tête un instant. SHERIF BELFAYE C'est pire. C'est bien pire. Jamais... Même a La Nouvelle-Orléans je n'avais jamais rien vu d'aussi... Alors ici ! Julia regarde son mari. Elle a presque l'air sévère. JULIA Et l'enquête ? SHERIF BELFAYE On a fait tout ce qu'on pouvait sur les lieux mais... Ca dépasse de loin mes compétences. Tout ce que je suis capable d'y voir, c'est... Il se ravise soudain, comme s'il ne préférait pas dire tout haut sa pensée. Julia hausse un sourcil interrogateur. SHERIF BELFAYE Knauf m'a conseillé de faire appel à un groupe de spécialistes. Des enquêteurs qui ont de l'expertise. JULIA (artificiellement neutre) Ce n'est qu'un meurtre. Tu n'aurais pas pu essayer de t'en sortir seul ? SHERIF BELFAYE Je suis Shérif de campagne, pas Profiler. DR. JACOBS Vous... Vous êtes en train de me dire que vous envisagez d'avoir à faire... SHERIFF BELFAYE Ce n'était pas un meurtre crapuleux ! Il y a eu mutilations, mise en scène. Bon sang, je ne vous souhaite pas de voir ça, c'était une boucherie abominable ! SEQUENCE 6 - Q.G. DE MILLENNIUM - COULOIR - INT. JOUR SUZANNE McCARLTON marche dans un couloir, en feuilletant un dossier, qu'elle tient dans une main. L'autre porte à sa bouche la paille d'une petite brique de jus d'ananas. Elle arrive devant la porte de son bureau et se contorsionne pour attraper sa clef. Dans le mouvement, une page du dossier tombe et virevolte dans les airs avant de tomber sur le sol, affichant un croquis d'ange, très similaire dans son design aux apparitions auxquelles nous avons assisté au cours de la seconde saison. Elle ramasse le papier, le replace dans son dossier et entre dans le bureau. SEQUENCE 7 - Q.G. DE MILLENNIUM - BUREAU DE SUZANNE - INT. JOUR Elle pose le dossier sur son bureau et s'installe devant son écran d'ordinateur, dont elle allume l'écran. Elle se place devant le micro. SUZANNE (machinalement) La nuit s'émancipent les marionnettes L'identification du code phrase faite, l'écran affiche l'Ouroboros et, au centre, son menaçant compte à rebours : ''IL RESTE 408 JOURS''. Puis, une boite de dialogue apparaît : ''TROIS MESSAGES HAUTE PRIORITE EN ATTENTE''. Suzanne clique sur la case OK. Les titres des trois messages s'affichent. ''RAPPORT DE L'AFFAIRE CRANSTON'' ; ''DEMANDE D'ASSISTANCE DES AUTORITES DE GALVESTON'' ; ''REPONSE : DOCUMENTATION''. La jeune femme clique sur le titre du milieu, ce qui ouvre le message correspondant. Trois photos apparaissent à l'écran, dépeignant la scène du crime du teaser sous différents angles. L'ensemble est extrêmement sanglant. L'abdomen de la victime est grand ouvert. Des lambeaux de chairs écartés pendent sur les cotés. Les intestins sont en partie extraits du corps et reposent partiellement sur le sol. Concentrée, Suzanne scrute ces images sans sourciller. D'un autre clic, elle affiche le texte joint aux images, que nous ne pourrons distinguer. SEQUENCE 8 - 1910 EZEKIEL DRIVE, SEATTLE - INT. JOUR FRANK BLACK est assis dans un fauteuil. Il compose un numéro sur son téléphone, l'air contrarié. On entend les sonneries du téléphone. Puis, après un claquement : PETER (OFF) Bonjour. Ici Peter Watts. Je ne peux pas vous répondre pour le moment. Laissez-moi un message. Frank se lève et se met à marcher en ronds. FRANK Peter... C'est Frank à nouveau. J'aimerai savoir pourquoi tu ne réponds pas à mes messages. J'aimerai savoir si tu vas bien. Je t'en prie, Pete, je... Un double bip de fait entendre dans le téléphone. FRANK (CONTINUANT) J'ai un double appel. Je vais en rester là, mais...s'il te plaît, rappelle-moi. (Il appuie sur une touche du téléphone :) Frank Black. SUZANNE (OFF) Bonjour Frank. C'est Suzanne. FRANK Bonjour. Suzanne se trouve au volant de sa voiture. SUZANNE Je suis désolée d'encore vous embarquer dans une affaire à la dernière minute, mais...je crois qu'il est important que nous agissions vite sur cette affaire. FRANK De quoi s'agit-il ? SUZANNE Un crime dans une toute petite ville du Texas. C'est le premier, mais... FRANK ...Mais tout indique que le tueur va recommencer. SUZANNE C'est le sentiment de la Police locale. Et le miens également... Vous allez pouvoir vous arranger avec Jordan ? FRANK Oui. Mon frère est en vacances. Il n'y aura pas de Problème. Il pourra être là très rapidement. SUZANNE En attendant, je suis en route pour chez vous. FRANK Vous ne viendrez pas avec moi ? SUZANNE Je suis retenue ici pour le moment. FRANK Entendu. A tout de suite. Il raccroche. Après une inspiration, il se dirige vers l'escalier qui mène à l'étage. D'en bas, il appelle. FRANK Jordan ! SEQUENCE 9 - GALVESTON - BUREAU DU SHERIFF - EXT JOUR Le Shérif gare sa voiture de fonction devant le bâtiment. Il en sort, son chapeau à la main, l'air aussi contrarié que tout à l'heure. En levant la tête vers les escaliers qu'il s'apprête à monter, il aperçoit un homme, DANIEL KNAUF, qui l'observe en silence. Le Shérif Belfaye se renfrogne encore plus, si cela est possible, et s'apprête à passer son chemin sans mot dire. DANIEL KNAUF Martin ! SHERIF BELFAYE Qu'est-ce que tu veux, Knauf ? DANIEL KNAUF Tu le sais. SHERIF BELFAYE Et toi, tu sais que je peux pas. Qu'il ne faut pas. DANIEL KNAUF Je ne vais pas pouvoir ne rien écrire sur tout cela. SHERIF BELFAYE Et pourquoi pas ? DANIEL KNAUF Je te passerai les appels de mon redac' chef. Tu comprendras. SHERIF BELFAYE Tu n'as qu'à reprendre les bruits qui courent. DANIEL KNAUF Fais attention à tes conseils. SHERIF BELFAYE Ecoute, Daniel... Tu as raison : je ne sais pas ce qu'on raconte. Je ne sais pas quelles sont les informations qui circulent sur une enquête en cours, dans laquelle aucun communiqué officiel d'aucune sorte n'a été fait. Une affaire à propos de laquelle tout le monde devrait être silencieux. Surtout toi. Daniel le fixe du regard, sans rien dire, semblant peser sa décision. SHERIF BELFAYE Laissons-leur une chance de régler tout ca avant que la presse ne complique les choses, d'accord ? Belfaye remet son chapeau sur sa tête et entre dans le bâtiment. SEQUENCE 10 - 1910 EZEKIEL DRIVE - CHAMBRE DE JORDAN - INT. JOUR Frank aide JORDAN à ranger des jouets dans une boite. FRANK Voilà. Tu ne voudrais pas que Suzanne trouve ta chambre tout en désordre. Jordan fait oui de la tête, mais l'expression de son visage dit le contraire. FRANK Qu'est-ce qu'il y a ? JORDAN Y'a personne d'autre ? Frank regarde sa fille, et on lit un instant la surprise sur son visage. Puis il lui adresse un sourire. FRANK Je t'ai déjà dit que non, Jordan. Et ton Oncle sera là dans une heure. JORDAN (Tripotant la tête d'un dinosaure en peluche) Oui. Tu es souvent avec cette dame maintenant. FRANK Je travaille avec elle. Un blanc. FRANK (CONTINUANT) Jordan, tu... Frank cherche ses mots, et ne trouve pas. Le bruit d'une voiture l'oblige de toute façon à s'interrompre. Il se lève et se dirige vers la fenêtre. POINT DE VUE DE FRANK : On aperçoit Suzanne sortir de sa voiture et se diriger vers le perron de la Maison jaune. Frank se retourne et jette un regard vers Jordan qui continue de tripoter son dinosaure. SEQUENCE 11 - 1910 EZEKIEL DRIVE - ENTREE - INT. JOUR Frank arrive depuis le salon, un petit sac de voyage à la main, en compagnie de Suzanne. FRANK Mon frère devrait être là dans moins d'une heure. SUZANNE Il n'y a pas de problèmes, Frank. Appelez-moi si le besoin s'en fait sentir. S'il le faut, je me libérerais. FRANK Je le ferai... SUZANNE (le coupant) Cela m'embête que vous enquêtiez seul. FRANK Pour tout vous dire, Suzanne, j'ai l'intention de demander à Peter son aide sur cette affaire. Frank garde les yeux posés sur Suzanne une seconde, puis tourne les talons et ouvre la porte de la maison. SEQUENCE 12 - Face à la Maison Jaune - Ext. Jour - Prolongement de la séquence 11. Frank fait le tour de sa Jeep rouge, afin de déposer sur le siège passager son sac de voyage. Ensuite, il la contourne à nouveau et prend place devant le volant. Pendant ce temps, Suzanne l'a rejoint dehors, et se place à coté de lui à la fenêtre. Elle l'observe avec un petit sourire. SUZANNE Je ne peux pas vous en vouloir d'espérer maintenir Peter au sein du Groupe. Et vous savez que nous avons toujours favorisé les initiatives personnelles, pour autant qu'elles ne soient pas notoirement néfastes... FRANK ...Mais ? SUZANNE (un sourire furtif) Mais je doute de vos chance de succès, dans ce cas précis. Je ne voudrais pas que vous perdiez du temps. FRANK (vaguement narquois) Hum. SUZANNE Dites-moi le fond de votre pensée. FRANK Peter est un ami. Dans ce contexte, la question de la perte de temps est hors-sujet. Suzanne répond par un sourire radieux. Frank enclenche la marche arrière et la Jeep s'engage sur la route. Elle s'élance finalement vers l'avant, et disparaît. La caméra s'approche du visage toujours amusé de Suzanne. SEQUENCE 13 - FACE A LA MAISON DES WATTS - EXT. JOUR La Jeep de Frank s'arrête devant la maison de Peter. Le Jardin est désert et triste, avec ses arbres et arbustes sans feuilles. Il aperçoit un instant le rideau d'une fenêtre qui se soulève dans son coin inférieur. Puis qui s'abaisse aussitôt, la Maison retrouvant son calme de mort. Frank pousse un soupir et secoue la tête, mécontent et déçu. D'au dessus, à la verticale, la caméra filme la portière rouge de la Jeep qui s'ouvre, et Frank qui s'extrait de la voiture. Tandis qu'il s'en éloigne, en direction de la maison, la caméra s'avance vers le sol en pivotant à la verticale, filmant Frank, de dos, marchant d'un pas déterminé vers cette maison. Vers Peter. FONDU AU NOIR tandis que la musique continue de monter en intensité. Elle se dissipe peu à peu sur les images du plan suivant. SEQUENCE 14 - RUES DE GALVESTON - EXT. JOUR Plan serré sur Frank, conduisant silencieusement, l'air renfrogné, une 4x4 de location qu'il vient de faire entrer dans la cité de Galveston. D'un coup d'œil au loin, il distingue le panneau qui matérialise la maison, en définitive semblable aux autres, qui abrite le bureau du Shérif. Il se gare devant. Toujours en plan serré, nous le suivons sortir de la voiture. Le coté conducteur donne sur la route, il contourne donc le véhicule pour rejoindre le trottoir. Arrivé au pied des escaliers qui mènent à l'entrée, il s'arrête et se retourne. PETER WATTS est assis sur le siège passager. Il se frotte les mains sur le visage. Il finit par regarder Frank qui, d'un mouvement de la tête, lui fait signe de sortir de la voiture. Peter le fait, finalement. Comme pour s'excuser, il s'adresse à Frank. PETER Je ne sais pas vraiment ce que je fais ici. FRANK Ton travail. Sans un mot de plus, il se commence à monter les marches. Peter lui emboîte le pas. Mais ils n'ont pas le temps de les gravir que le Shérif apparaît en haut, sortant un peu précipitamment. Il les regarde un instant, avec un mélange de crainte et d'espoir. FRANK Shérif Belfaye ? Bonjour, je suis Frank Black et voici Peter Watts. A votre demande, le Groupe Millennium nous a envoyé participer à l'enquête. Pour la première fois depuis le début de l'épisode, le Shérif esquisse un sourire. SHERIF BELFAYE Bah, je suis pas mécontent de vous voir ! Par dessus l'épaule de Frank, Belfaye jette un œil vers Peter et sa tête d'enterrement. Son sourire s'évanouit. SHERIF BELFAYE Hum, je suppose que vous souhaitez voir les lieux du crime ? SEQUENCE 15 - CAVE - INT. JOUR Le décors de la fin du teaser. Depuis le crime de la veille, le corps a été enlevé. Mais le sang demeure sur la table sur laquelle il reposait, et sur le sol. Depuis le bas de l'écran, une photographie envahit l'image : les mêmes lieux, mais avec le corps ouvert et en partie évidé à sa place. C'est Peter qui a cette photo en main, l'air sombre. Il s'approche de la table, et fixe le sang. PETER Est-ce qu'il manquait un organe ? SHERIF BELFAYE L'autopsie complète est prévue pour la fin de l'après midi, Monsieur Watts. Mais le rapport préliminaire établit que non. Peter hoche silencieusement la tête. Il lève les yeux vers Frank, resté en retrait, près de la porte de la cave. L'homme est tendu, les sourcils froncés. VISIONS INTERNES DE FRANK : - L'eau d'une rivière paisible qui s'écoule, tandis qu'il entend un torrent. - Deux hommes aux traits flous, mais qu'on devine parfaitement identiques, qui se font face puis s'empoignent avec rage. - Deux voitures qui entrent en collision. - Un ventre percé par un levier de vitesse enfoncé dans l'organisme. SHERIF BELFAYE Bien sûr, je me doute que ce que vous pourrez apprendre de ces lieux est limité, maintenant. FRANK Shérif... Dites-moi... Est-ce qu'il y a eu un violent accident de voiture dans les alentours, récemment ? Le Shérif affiche une mine ébahie. SHERIF BELFAYE Heu... Oui. Un type de passage et Doug McIntyre en sont morts. Il s'est jeté sur sa femme pour la protéger... Elle était sur le siège passager. Le levier de vitesse l'a traversé de part en part, le pauvre. FRANK Cette femme... Elle est en vie ? SHERIF BELFAYE Oui, oui. Il l'a vraiment sauvée. FRANK Je voudrais la voir, s'il vous plaît. Gros plan sur Peter, tandis qu'on devine une lueur d'intérêt curieux dans son regard ; puis retour sur la mine déterminée de Frank. FONDU AU NOIR. ACTE 2 SEQUENCE 16 - DOMICILE DE BETH McINTYRE - INT. JOUR Frank, Peter et le Shérif Belfaye sont assis dans le salon de Beth McIntyre, la femme aperçue dans le teaser. Celle-ci se rassoit, une théière à la main, l'air un peu agacée. BETH Qui m'avez-vous dit que vous étiez, déjà ? FRANK Frank Black et Peter Watts, nous appartenons à un groupe d'enquêteurs privés que le Shérif a sollicité. BETH Vous êtes ici pour le meurtre d'O'Maley ? FRANK Oui. BETH Alors pourquoi me posez-vous des questions sur mon accident ? FRANK Un accident mortel dans une si petite ville, ce n'est pas si fréquent, Madame McIntyre. Je soupçonne un lien entre les deux événements. J'envisage que votre drame ait servi de déclencheur au tueur. Peut-être connaissait-il votre mari...? BETH Ca n'a pas de sens pour moi. PETER Pour l'instant, Madame McIntyre, cela n'en a pas forcément beaucoup pour nous non plus. C'est pour cela que nous vous demandons de nous aider. Peut-être que vos souvenirs nous permettrons d'exclure cette hypothèse. FRANK J'ai lu le rapport que vous avez fait à la Police. Une chose en particulier m'intrigue. BETH Quoi donc, Monsieur Black ? FRANK Lors de votre interrogatoire préliminaire, à l'hôpital, vous avez déclaré avoir vu quelqu'un près de la voiture, avant l'arrivée des secours. BETH Monsieur, j'ai eu deux cotes cassés, et j'ai sombré dans le coma pendant 36 heures peu après mon arrivée à l'hôpital... FRANK Mais vous avez vu quelqu'un ? BETH J'ai cette image dans la tête. Une ombre qui contourne la voiture, fait tomber la portière du coté du conducteur, et qui s'est penchée vers mon mari. Mais est-ce un souvenir, une hallucination, un rêve ? Je ne peux pas vous répondre, Messieurs. PETER Bien. Nous comprenons. FRANK Si jamais ces images gagnaient en précision, n'hésitez pas à contacter le Shérif, madame. Cela pourrait... Frank est interrompu par des bips en provenance de la radio du Shérif. OFFICIER ASTIN (OFF) Officier Astin pour le Shérif Belfaye, est-ce que vous me recevez ? SHERIF BELFAYE Cinq sur cinq. Qu'est-ce qui se passe ? OFFICIER ASTIN (OFF) On en a un deuxième, Shérif. Je veux dire... Une deuxième victime. Il a recommencé. Tandis que le poids du monde s'abat sur les épaules du Shérif Belfaye et affaisse les traits de son visage, nous passons par un FONDU ENCHAINE à : SEQUENCE 17 - UNE CHAMBRE SOMBRE ET PRESQUE VIDE - INT. JOUR Gros plan sur un sac de cuir à l'intérieur taché de sang, où une main plonge et extrait des outils chirurgicaux basiques - ceux déjà vus dans le teaser. La main les passe sous l'eau d'un robinet, et les brosse consciencieusement. Puis, l'homme ferme le robinet, attrape un chiffon sec, dans lequel il essuie délicatement le matériel, qu'il range dans une mallette. Une fois ceci fait, l'homme plonge à nouveau la main dans le sac, et en sort une petite boite de forme carrée et de couleur sombre. Elle aussi est tachée de sang, mais il ne s'en préoccupe pas. Il l'amène jusqu'à une étagère que la pénombre nous avait cachée jusque là. La caméra nous montre d'abord l'étagère du milieu, où se trouve posées en désordre plusieurs de ces mêmes boites, ouvertes et vides celles-là. En pivotant vers le haut, on nous dévoile le contenu de l'étagère supérieure. Il y a deux autres de ces boites, fermées et légèrement tachées de sang. L'homme pose la troisième juste à coté. Le CONTRE-CHAMP nous fait finalement découvrir le visage de celui dont on apprendra plus tard qu'il s'appelle MARCUS FRANKLIN. Il observe paisiblement ces boites, les yeux légèrement écarquillés. SEQUENCE 18 - VOITURE DU SHERIF - ROUTE DE CAMPAGNE - EXT. JOUR La voiture emprunte une route qui longe une rivière. Le Shérif conduit, tandis que Frank et Peter sont assis à l'arrière. FRANK Shérif, vous ne nous en avez pas beaucoup dit sur les circonstances du premier meurtre. Le corps a été déplacé depuis le pont où on a retrouvé les affaires de pêche d'O'Maley jusque la cave d'une maison vide dans le centre bourg, à priori en plein jour, sans que personne ne voie rien ? SHERIF BELFAYE Oui. Le jour du meurtre, c'était l'anniversaire de la fondation de la ville. Une fête est organisée chaque année depuis deux siècles et quelques pour fêter cet événement et rendre hommage aux frères Galveston, qui ont donné leur nom à leur ville. C'était des gens érudits, surtout pour l'époque, qui ont émit le souhait de réunir une communauté positive autour d'eux. Quelque part, le succès de cette fête leur donne raison. Il n'y a pratiquement pas un villageois qui la rate. Voilà pour la version rose de l'histoire. PETER Mais O'Maley, lui, il préférait sa partie de pêche à la célébration du bonheur communautaire. SHERIF BELFAYE C'était un marginal. En fait, il ne venait pas d'ici. Il a hérité de sa maison par un grand-oncle, je crois, et est venu y passer ses vieux jours. Personne ne s'intègre vraiment complètement ici...mais lui il n'a jamais essayé. FRANK Je me trompe, ou vous parlez d'expérience ? Le Sherif esquisse un sourire. SHERIF BELFAYE Votre expertise ne vous trompe pas, Monsieur Black. Je ne suis pas d'ici non plus. Ma femme l'est. Elle m'a rencontrée lors de vacances passées à La Nouvelle Orléans, où je vivais à l'époque. Elle s'est arrangée pour que je puisse avoir ce poste ici... Je l'ai suivie. FRANK Combien êtes-vous, à ne pas être d'ici ? SHERIF BELFAYE Et bien maintenant que le Sauvage O'Maley - comme on l'appelait ici - n'est plus, il ne reste plus que moi et le correspondant local du journal régional, Daniel Knauf. FRANK Vous avez parlé de la version rose de l'histoire. Quelle est la partie sombre ? SHERIF BELFAYE Ce ne sont pas les premiers meurtres à survenir à Galveston, Monsieur Black. En fait, le premier remonte à la création de la ville elle-même. Virgil Galveston a tué son frère Jayce de ses mains. Les livres mentionnent un désaccord sur les Terres. PETER Effectivement, voilà qui entache un peu le tableau de famille. SHERIF BELFAYE Toujours est-il que le fils de Jayce a rendu son compte à Virgil, des années plus tard. En vérité, c'est cet homme, Horald Galveston, qui fut le véritable fondateur de la ville, en unifiant les Terres détenues par son père et son Oncle. Mais il y a certaines choses que l'histoire préfère faire semblant d'oublier, et le rêve originel des frères Galveston - celui d'une Communauté solidaire - a supplanté le reste des événements. Mais comme je l'ai dit, je ne suis pas d'ici. N'importe qui d'autre dans la ville pourra vous raconter tout cela avec beaucoup plus de détails et de passion. FRANK Vous en êtes certain ? SHERIF BELFAYE (avec un sourire) Vous risquez de devoir insister un peu pour avoir les détails sur la partie sombre de l'histoire, cela dit... Frank hoche pensivement la tête. FRANK Hum. Le Shérif quitte la route principale pour s'engager dans un chemin de terre, au fond duquel s'élève une ferme et, non loin, une haute grange à coté de laquelle une voiture de police est déjà stationnée. Deux hommes sont postés devant la porte fermée de la grange. SHERIF BELFAYE Nous arrivons. Le Shérif vient garer son propre véhicule juste à coté de la première voiture. SEQUENCE 19 - GRANGE A FOIN - EXT. JOUR La caméra filme de l'intérieur la face de la grange où se trouve la grande porte à double battants. Celle-ci est fermée, on la distingue notamment par les rayons de soleils puissants qui se glissent dans les interstices, là plus qu'ailleurs encore entre les planches de bois. Cette porte s'ouvre soudain, et le Shérif, Frank et Peter sont réduits à l'état de silhouettes par le contre-jour violent qui provoque une image surexposée. L'un des officiers de Police en poste à l'extérieur referme la porte derrière eux, et le retour d'une certaine pénombre nous permet de distinguer à nouveau les visages. SHERIF BELFAYE J'avais donné des instructions à mes hommes pour qu'ils s'assurent qu'une éventuelle nouvelle scène de crime soit préservée avant votre arrivée sur les lieux. Le Shérif est livide, il passe sa main sur son visage. Frank a fait un pas de plus que lui en avant. Il observe les lieux, les sourcils froncés, semblant comme photographier les lieux. L'image alterne des plans rapides de la victime avec celui du visage dans l'enquêteur. La scène de crime est assez semblable à celle du teaser, compte tenu des aménagements liés à ce lieu. La victime n'est pas étendue sur une table, mais sur des bottes de foins regroupées. Les brins dorés sont, autour du corps, imbibés de sang. Un bras pend sur le coté, celui-là même vers lequel une partie des organes a été évidée. C'est Peter qui, le premier, s'approche de la victime. Tandis qu'il le fait, son expression se fige soudain, et on peut lire dans ses yeux qu'il est habité par une intense réflexion. PETER Frank... La victime... Tu as vu ? FRANK (détaché) Oui. Elle est Noire. SHERIF BELFAYE Les Grant descendent d'une famille d'esclaves... Mais c'est important ? PETER Qu'un tueur en série alterne d'un groupe ethnique à un autre, c'est... FRANK ...C'est rarissime, Shérif Belfaye. Tout à fait rarissime. Pendant ce temps, Peter a repris son examen rapproché de la victime, en tournant autour du socle de foin. PETER Le tueur est excessivement méticuleux, parfaitement organisé. Ses crimes sont tous prémédités, et pas le résultat d'une pulsion qui serait violente et soudaine. Qu'il prenne du plaisir à ouvrir ses victimes, à les évider comme pour mieux observer leur intérieur est particulièrement intéressant. Frank hausse un sourcil circonspect. SHERIF BELFAYE Mais qu'est-ce que son esprit taré veut ? PETER Peut-être est-ce la clef ? Une observation de l'humanité... Doit-on s'attendre à ce que la prochaine victime appartienne à une autre catégorie ethnique ? Peut-être même sera-t-elle une femme. Qu'en penses-tu Frank ? Ton profil psychologique préliminaire est concordant ? FRANK Peter, mon profil psychologique préliminaire est inexistant. Mais ce que tu dis est digne d'intérêt. Peter relève la tête vers Frank, surpris. Comme renonçant à le comprendre pour le moment, il se tourne à nouveau vers le Shérif. PETER Shérif Belfaye, l'autopsie de la première victime... Je souhaiterais y assister. Belfaye hoche la tête. SEQUENCE 20 - DOMICILE DES BELFAYE - EXT. JOUR Le Shérif gare sa voiture de fonction devant chez lui. Frank en fait de même avec le véhicule de location. SHERIF BELFAYE Nous y sommes. De toute façon, Monsieur Black, il n'y avait pas vraiment le choix. Il n'y a pas d'hôtels dans le coin. Ma femme sera ravie. Elle aime avoir du monde à la maison. FRANK (attrapant son sac de voyage) En tout cas, je vous remercie, Shérif. SEQUENCE 21 - CHAMBRE D'AMIS DES BELFAYE - INT. SOIR Frank est assis au bureau. Ses lunettes sur le nez, il consulte des dossiers, des fiches sur O'Maley, Grant et McIntyre, les deux victimes du tueur et l'accidenté. On frappe à la porte. FRANK Oui. Julia Belfaye entrouvre la porte, toujours vêtue de son ensemble beige. JULIA Monsieur Black... Le diner vous attend. Frank lui répond par un sourire. SEQUENCE 22 - DOMICILE DES BELFAYE - SALON - INT. SOIR Frank apparaît dans le salon. Le Shérif lui désigne de la main sa place à table et s'assied en même temps que lui. SHERIF BELFAYE Vous vous arrêtez de travailler, parfois ? Frank sourit. FRANK Je suis papa d'une petite fille, vous savez. Je mène une vie différente pendant mes enquêtes. SHERIF BELFAYE Votre femme doit être exceptionnelle pour accepter cette forme de sacrifice. Immédiatement, le Shérif perçoit une certaine gêne chez Frank. SHERIF BELFAYE Excusez-moi... C'était excessivement maladroit. Je ne connais rien à votre situation et... FRANK Ce n'est rien, ce n'est rien. Je... Ma femme était une personne d'exception, effectivement. Malheureusement elle nous a quitté il y a six mois. Une seconde passe. SHERIF BELFAYE L'épidémie ? Frank hoche la tête. SHERIF BELFAYE Même ici à Galveston, on a perdu dix personnes avec cette saloperie. Un silence. FRANK Je... Je travaillais sur les victimes. Sur ce qui pouvait les relier dans l'esprit du tueur. SHERIF BELFAYE Vous avez trouvé quelque chose ? FRANK Peut-être. Hum... O'Maley était en train de pêcher quand on l'a enlevé. Grant vivait de son exploitation agricole : des champs fertiles en bordure de la rivière. SHERIF BELFAYE Cela pourrait n'être qu'une coïncidence. FRANK Ce qui me fait avoir des doutes, c'est ceci : Doug McIntyre était directeur adjoint de l'usine de retraitement de l'eau du fleuve qui se trouve à quinze kilomètres d'ici. SHERIF BELFAYE Vous êtes toujours persuadé que cet accident est directement lié à l'affaire ? FRANK J'ai pris l'habitude d'accorder du crédit à mes intuitions. SEQUENCE 23 - CIMETIERE DE GALVESTON - EXT SOIR Le responsable des meurtres, Marcus Franklin, se tient devant une tombe, les yeux fermés. Il se recueille. Après un instant, l'homme s'agenouille, effleurant la pierre tombale du bout des doigts. C'est celle de Virgil Galveston. MARCUS Certains rêves doivent être féconds. Marcus prend une profonde inspiration, et passe sa main à plat juste sur l'extrémité des brins d'herbe de la tombe. MARCUS (hochant la tête) Pour la restauration de Maât. Pour la restauration de Maât. SEQUENCE 24 - SALLE D'AUTOPSIE - INT. NUIT Vue d'ensemble de la pièce. Une LEGISTE note le résultat de la pesée du cœur de la victime. Sur cette image, une légende s'affiche : ''Centre Médical de Morisson City''. Peter est présent, observant avec attention et intérêt les geste de la docteure. Celle-ci est le contraire du docteur froid comme la mort. On s'attend d'un instant à l'autre à ce qu'elle se mette à siffloter. LEGISTE Le tueur a procédé à une incision classique en " Y ", quoi qu'assez imprécise. Il n'est pas médecin, mais il regarde les séries policières à la télé, comme tout le monde. PETER Pourtant, je pensais que la télé n'assumait plus son rôle d'éducation. LEGISTE Après ça, il a écarté la peau, et a entreprit de faire le ménage là-dedans, écartant les organes pour une raison inconnue. " Raison inconnue ", ca fait plus chic que " par plaisir sadique ". Peter contemple la femme d'un air intrigué. LEGISTE Je ne vous choque pas, j'espère. Vous savez, quand ils arrivent chez moi, ils sont tellement froids que ce n'est plus vraiment la peine que je me fasse du tracas pour eux. PETER C'est une manière comme une autre de créer une distance, et cela ne me choque pas. Mais revenons au tueur... Est-ce que vous avez pu estimer la durée de vie des victimes. Je veux dire, combien de temps ont-elles survécu aux tortures ? LEGISTE Attendez, qui a parlé de tortures ? PETER Mais je supposais... Et puis vous avez parlé vous-même de plaisir sadique. LEGISTE Ce n'est pas dans ce sens que je l'entendais. Vous n'y êtes pas, Monsieur Watts, il n'y a pas eu d'actes de tortures. SEQUENCE 25 - SALON DES BELFAYE - INT. NUIT Le Shérif, sa femme et Frank sont attablés. Le repas vient de se terminer. Le portable de Frank se met soudain à sonner. FRANK (décrochant) Excusez-moi... Oui ? C'est Peter qui est au téléphone. Il se trouve dans la salle d'autopsie de la séquence précédente. PETER Frank, c'est Peter. FRANK L'autopsie est terminée ? PETER Pas encore tout à fait. Mais il y a quelque chose qu'il fallait que je te dise tout de suite. FRANK J'écoute. PETER Le tueur n'a pas cherché à faire souffrir ses victimes. Je veux dire... Il a fait en sorte que tout se déroule le plus paisiblement possible pour elles. FRANK C'est à dire ? PETER Il les a d'abord endormies au moyen d'un puissant somnifère. Puis il les a étouffé dans leur sommeil. C'est post-mortem qu'il a réalisé toutes les mutilations. FRANK Je vois. Tiens moi au courant s'il y a encore du nouveau. Frank raccroche, l'air pensif. SHERIF BELFAYE C'était votre collègue... FRANK Oui, avec les premiers résultats d'autopsie. SHERIF BELFAYE Et ça ne cadre pas, hein. Heureusement qu'on m'a recommandé à vous... Je ne sais pas ce que j'aurais fait d'une affaire pareille. Frank fronce soudain les sourcils. FRANK On vous a recommandé Millennium ? SHERIF BELFAYE Oui, bien sûr. Je n'avais jamais entendu parler de vous, pour ma part. SEQUENCE 26 - Q.G. DE MILLENNIUM - BUREAU DE SUZANNE - INT. NUIT Suzanne est assise derrière son bureau. Elle attrape le combiné du téléphone, appuit sur une touche, et attend une seconde que les tonalités commencent à retentir. VOIX (OFF) Allô ? SUZANNE Ici Suzanne McCarlton. Vous avez du nouveau ? VOIX (OFF) Pas vraiment. Vous avez parlé à Frank ? SUZANNE Non, il ne m'a pas encore appelé. S'il ne le fait pas d'ici là, je le contacterai demain matin. VOIX (OFF) Vous savez, ma position, dans ce cas précis, se révèle un handicap. Personne n'a envie que les détails de l'affaire ne finissent dans les journaux. On découvre alors que c'est Daniel Knauf, le journaliste de Galveston vu dans le premier acte, qui parle avec Suzanne. DANIEL KNAUF Même le Shérif Belfaye préfère ne pas trop me parler pour l'instant. J'espère que je pourrai avoir des informations significatives demain. SUZANNE Entendu. Tenez-moi au courant. Sur l'image du visage vaguement contrarié de Suzanne : FONDU AU NOIR ACTE 3 SEQUENCE 27 - COUR ARRIERE DU RESTAURANT ''CHEZ MOLLIE'' - EXT. MATIN MOLLIE JENKINS, la quarantaine, sort par la porte arrière, deux gros sacs- poubelles à la main. Elle arrive dans une arrière court où se trouvent trois grosses bennes presque pleines - ce qui nous fait supposer que nous sommes jour de collecte. L'ensemble est teinté d'orangé par les rayons du soleil levant. Traînant l'un des sacs qu'elle n'arrive plus à porter, elle contourne le premier bac, définitivement plein, pour atteindre le troisième. Mollie s'arrête tout à coup, et laisse tomber au sol le sac qu'elle portait, qui roule sur le coté. Elle a déjà lâché l'autre, et garde les yeux fixés devant elle. Ce qu'elle regarde, c'est le coté du troisième bac, qui vient de rentrer dans son champ de vision. Il est maculé de sang. Prudemment, à petit pas, Mollie recommence à avancer. Elle tend le cou, le buste en avant, les sourcils froncés, prête à déguerpir en cas de danger. Mais de danger, il n'y en a plus. Mollie aperçoit d'abord une jambe, puis un corps entier. Il gît sur le sol, tordu. Il est éventré, mais rien à voir avec le contexte chirurgical des premiers crimes : il s'agit ici d'une boucherie sans nom. Son abdomen a été éventré à main nues. Mollie ne crie pas, elle n'en a plus la force. Elle fait un pas en arrière, trébuche, et tombe sur le sol. Elle se traîne jusqu'à pouvoir s'appuyer sur le second bac, à un endroit où ce sinistre tableau sera caché à sa vue. Elle porte sa main à sa bouche. Son visage est contracté, mais aucune larme ne coule. La patronne du restaurant est en état de choc. SEQUENCE 28 - CHAMBRE D'AMIS DES BELFAYE - INT. MATIN Frank ouvre un œil endormi, et se retourne. Il remarque alors que l'autre lit de la pièce est froissé, mais déjà vide. A ce moment, du bruit se fait entendre dans la salle de bain attenante, et Peter en sort, déjà prêt. FRANK Peter... Je ne t'ai même pas entendu rentrer. PETER L'autopsie s'est prolongée assez tard. FRANK Pas assez pour te fatiguer, apparemment. Peter lui sourit. L'expression est un peu forcée, mais semble partir d'une bonne intention. PETER Tu... Tu avais raison, Frank. C'est mon travail. J'ai eu tort de l'oublier. Frank lui sourit à son tour. FRANK C'est bien. PETER Tu as avancé sur le profil ? FRANK Je ne sais pas si un profil au sens classique du terme est pertinent dans cette affaire. Beaucoup d'éléments n'ont pas de sens. PETER Qu'est-ce que tu en déduis ? FRANK Pour l'heure, il faut continuer d'enquêter. Mais je suspecte que ces meurtres ne soient pas à motivations sexuelles. Peter hoche la tête, et s'apprête à quitter la pièce. FRANK Peter !... J'ai appris hier soir que... Ce n'est pas le Shérif qui a directement contacté Millennium. C'est Daniel Knauf, le journaliste, l'autre étranger à la cité, qui le lui a recommandé. PETER Hum. FRANK Tu n'en sais pas plus ? PETER Comment ça ? FRANK Je suspecte que le Groupe ait un autre niveau d'implication que la simple investigation d'un crime, Peter. Compte tenu de la place que tu y a tenu... Je me demandais si tu avais déjà entendu parler de cette ville ou...de quoi que ce soit. PETER Non, Frank. Ce n'est pas le cas. Il quitte la pièce. SEQUENCE 29 - SALON DES BELFAYE - QUELQUES INSTANTS PLUS TARD - INT. JOUR Frank s'est habillé à la hâte. Il descend les escaliers. De là, il remarque d'abord Julia Belfaye, dans l'entrebâillement de la porte de la cuisine, qui écoute dans ses habits beige et pensant qu'on ne la voit pas, la conversation de son mari. Quelques marches encore, et Frank croise le regard fermé et sévère de Peter. Quelque chose s'est produit. En bas de l'escalier, le Shérif entre finalement dans son champ de vision au moment où il raccroche son portable. Lui-même aperçoit Frank, et le fixe un moment. Il prend uns inspiration, et, s'adressant aux deux hommes sur un ton un peu foré, lance finalement : SHERIF BELFAYE Messieurs. Je crois que ce qu'il s'est passé cette nuit ne permettra pas à cette affaire de retrouver les clous de la normalité. SEQUENCE 30 - DOMICILE DU DOCTEUR JACOBS – REZ-DE-CHAUSSE - INT. JOUR Une légende à l'écran nous situe les lieux : ''Domicile du Docteur Arthur Jacobs Galveston'' Un coup discret à la porte, et celle-ci s'ouvre sans que personne n'ait donné l'autorisation d'entrer. C'est Julia Belfaye. JULIA (regardant autour d'elle) Arthur ! Arthur, est-ce que tu es là ? Elle franchit le seuil, visite le salon. JULIA Ta secrétaire m'a dit que tu n'étais pas à ton cabinet... Personne non plus dans la cuisine. Soudain, le visage de Julia Belfaye affiche une franche inquiétude. JULIA Arthur ! Qu'est-ce qui se passe ? DR. JACOBS (OFF) Je suis là. Julia lève la tête : la voix du Docteur provient de l'étage. Visiblement tendue, elle entame la montée des marches. SEQUENCE 31 – DOMICILE DU DR. JACOBS – COULOIR – INT. JOUR Nous la retrouvons alors qu'elle débouche dans le couloir de l'étage. Au bout, une porte entrouverte sur une pièce plongée dans la pénombre. Il s'agit de la chambre du Docteur, vers laquelle elle se dirige à pas prudents. SEQUENCE 32 – DOMICILE DU DR. JACOBS – COULOIR – INT. JOUR Julia pousse la porte de la chambre. JULIA Arthur, il faut faire cesser tout ceci. Il faut trouver celui d'entre nous qui a rompu le pacte. Le Docteur Jacobs n'est qu'une ombre, une silhouette qui se détache vaguement sur le fond grisâtre de lourds rideaux tirés devant la fenêtre. DR. JACOBS Impossible. Julia reste sur le pas de la porte. JULIA (les sourcils froncés) Pourquoi pas ? DR. JACOBS Dans une communauté qui s'est construite sur un secret partagé, on ne peut pas espérer qu'un homme se trahisse. JULIA Il le faut. La silhouette d'Arthur Jacobs secoue la tête. DR. JACOBS On en est plus là, Julia. J'ai attendu, j'ai attendu, mais il fallait... Il s'interrompt, soudain. Julia est effarée de ce qu'elle commence à comprendre. JULIA Rien ne devait se passer ainsi. Ce n'est pas comme ça que les choses étaient écrites. Cette violence... C'est une menace mortelle pour Maât. Le Dr. Jacobs sort soudain de ses gonds. Il se précipite vers Julia, l'attrape par ses deux épaules et la secoue avec vigueur. DR. JACOBS Tu vois pas que la plus grande menace pour Maât, c'est de se laisser ravir le nouvel Horus par n'importe qui ?! Notre responsabilité est de ne pas laisser ceci se produire. Quoi qu'il nous en coûte à titre personnel. Jacobs relâche finalement Julia, bouleversée. JULIA (un murmure) Arthur... DR. JACOBS Les Dieux jugeront mon âme. Julia, lentement, tend la main vers le bouton de l'interrupteur. Le plafonnier illumine soudain le Dr. Jacobs, effrayant, débraillé, les mains couvertes de sang et de Terre. Ses yeux se baissent vers le sol, sa honte est visible. Il s'approche de Julia, choquée, et la prend dans ses bras. Ses mains putrides souillent la chevelure de la femme du Shérif. Il lui répète, tout bas, à l'oreille : DR. JACOBS Les Dieux jugeront mon âme. SEQUENCE 33 - CIMETIERE DE GALVESTON - EXT. JOUR Gros plan sur Frank, le sourcil levé en signe de perplexité. La caméra pivote avec lui tout en se reculant, découvrant le sinistre spectacle que lui, Peter et le Shérif Belfaye contemplent : 6 tombes ont été éventrées, profanées. Peter et Frank s'avancent vers l'une d'elles. Frank jette un œil à la Pierre tombale : Lois Doyle 1912 - 1984 A l'intérieur le corps de cette femme, dont les chairs ont été préservées, est éventrée. Comme pour les meurtres, on lui a ouvert l'abdomen qu'on a découpé. L'œil de Frank remarque aussi un petit livre qui repose dans le cercueil à coté du corps, ainsi que des petits bonshommes en bois. Le Shérif s'est avancé et s'est placé entre Frank et Peter. SHERIF BELFAYE (serrant son couvre-chef contre lui) Ca explique des choses, pour vous ? FRANK Pas vraiment. C'est plutôt le genre de chose qu'un détraqué fait avant d'en venir au meurtre. PETER Peut-être qu'il a été contrarié, qu'il n'a pas pu assouvir sa soif. Frank fait la moue. Il se détourne de cette tombe et se dirige vers les autres, une part une. Dans la seconde et la troisième comme dans la première, le corps bien conservé est accompagné d'un petit livre et de figurines semblables. Alors qu'il est en chemin vers la quatrième tombe profanée, il pose le pied sur une surface dure. Il s'arrête et regarde. Il vient de découvrir ce qui était resté jusque là caché dans l'herbe un peu haute : le couteau ensanglanté qui a servi à ouvrir l'abdomen des victimes. Peter s'en approche en passant un gant à sa main. Il s'agenouille à coté du couteau, la soulève et la place dans un sachet de plastique. PETER Il n'avait pas utilisé cette arme jusque là. FRANK (frustré) Je reconnais les points communs, mais...les modus operandis sont trop divergents. Quelque chose nous échappe, Peter. Un peu agacé, Peter hoche sombrement la tête. Au second plan, le Shérif se tient debout près de la première tombe. Il observe, décontenancé, les deux spécialistes. Il tourne la tête, et nous voyons avec lui un de ses AGENTS courir depuis la voiture garée plus loin, en bordure du cimetière. L'AGENT (essoufflé) Shérif ! Il y a eu une autre victime. Un autre meurtre. SEQUENCE 34 - SALLE D'AUTOPSIE - MORISSON CITY - INT. JOUR Un assez bref plan général de la pièce nous montre que Frank, Peter et le Shérif sont présents dans la pièce où repose le corps de la victime du restaurant, en partie dissimulée par Le Shérif et Peter. Frank se trouve de l'autre coté de la table où il repose. On passe justement à un plan plus centré sur Frank. Les pieds de la victimes figurent au premier plan. Frank s'avance et la caméra le suit, remontant vers la visage de la victime. Lorsqu'elle y arrive, la mise au point se fait sur ce visage et nous découvrons alors l'identité du cadavre : Marcus Franklin, l'assassin des deux premières victimes. Sur cette image : SHERIF BELFAYE Il s'appelle Marcus Franklin. Il travaillait au bureau du tourisme. FRANK (hochant la tête) Hum. SHERIF BELFAYE Ses collègues nous ont dit l'avoir trouvé très perturbé ces dernières semaines. Il a manqué plusieurs jours de travail. Un instant de silence. Peter, l'air impassible, fixe son regard sur Frank. FRANK Le lien avec notre affaire ne fait aucun doute, ne serait-ce que compte-tenu de la taille de cette ville, et surtout parce que les mutilations ont toujours la même finalité : ouvrir l'abdomen et en exposer l'intérieur. Mais il est impossible de ne pas s'interroger sur la variabilité des modes opératoires. Les deux premières victimes ont été ouvertes au scalpel d'étudiant en biologie, avec le souci de minimiser la douleur des victimes. Les cadavres du cimetière ont été ouverts au couteau et à la hâte. Celui-ci a été éventré à main nues. Le Shérif frotte sa paume sur son front. PETER Est-ce que tu pense à un cas de schizophrénie ? Ou alors à plusieurs tueurs ? FRANK Je ne sais pas, mais... Frank regarde le Shérif, puis fixe à nouveau Peter en silence. Après un instant, il sort de la pièce. SEQUENCE 35 - COULOIR DU CENTRE MEDICAL - PROLONGEMENT SEQUENCE 34 - INT. JOUR Peter le rejoint aussitôt dans le couloir. PETER Mais...? Frank s'arrête de marcher et se retourne vers Peter. Il parle bas. FRANK Mais il y a clairement des choses surréalistes dans cette affaire. Est-ce que tu as vu depuis quand ces corps au cimetière étaient enterrés ? (Peter hoche la tête) Leur état de conservation ne doit rien à la nature. Et tu as vu que les cercueils contenaient tous un livre et des figurines. PETER Embaumement, livre des morts, et serviteurs destinés à aider l'âme du défunt dans son voyage spirituel. J'ai constaté comme toi que ces gens respectent des rites de mort de l'Egypte Ancienne, oui. Mais je ne suis pas sûr de te suivre. Quel lien avec l'enquête ? FRANK Pour l'instant, je ne sais pas. Mais probablement tout. Ce contexte est anormal, et cette affaire l'est tout autant. Notre expertise en criminologie est inopérante ici. Je n'ai pas voulu le dire devant le Shérif, mais tu réalises que l'homme qui a mutilé les corps du cimetière y a passé la nuit. Il n'a pas pu tuer ce Franklin. Peter fait la moue un instant. PETER Tu soupçonnes le Shérif d'en savoir plus qu'il ne le dit ? FRANK A vrai dire, je ne pense pas. Mais je n'ai pas voulu tenter ma chance. PETER (hochant la tête) Je vais rester surveiller l'autopsie. FRANK Entendu. Frank s'apprête à partir. PETER Et toi, Frank ? Où est-ce que tu vas ? FRANK Je pense que l'autre pièce rapportée de la communauté n'est pas venue à Galveston par hasard. SEQUENCE 36 - BUREAUX DE LA PERMANENCE LOCALE DE 'PINEY WOODS NEWS' - INT. JOUR Daniel Knauf est assis devant l'ordinateur. Sur l'écran, défilent devant lui des articles de la page consacrée aux informations de Galveston d'éditions passées du Piney Wood News. Frank ouvre soudainement la porte et entre dans la pièce. Il fixe le visage outré de Knauf. FRANK Bonjour Monsieur Knauf. Peut-être devrais-je dire « cher collègue ». L'expression de perplexité et d'inquiétude du journaliste diminue. Il se lève de sa chaise. DANIEL KNAUF Des deux, je suppose que vous devez être Frank Black. FRANK Vous supposez juste. DANIEL KNAUF Vous savez, je ne suis pas membre du Groupe. Moue dubitative de Frank. FRANK Mais vous êtes suffisamment lié à lui pour pouvoir solliciter directement l'aide de Suzanne McCarlton. DANIEL KNAUF Vous cherchez à me faire avouer quelque chose ? FRANK Votre implication dans cette affaire. Celle du Groupe. DANIEL KNAUF Je ne comprends pas. FRANK J'ai longtemps été naïf vis à vis de Millennium, Monsieur Knauf, mais de lourds événements ont fait changer les choses. Ne me prenez pas pour un imbécile. DANIEL KNAUF Je vous assure que... FRANK Il y a forcément une raison pour que Millennium dispose d'un agent permanent dans un coin aussi perdu que celui-ci. DANIEL KNAUF Monsieur Black, je ne suis pas un agent de Millennium. J'ai juste quelques connaissances qui... FRANK (s'avançant soudain et se plantant devant l'ordinateur) Je peux vous demander ce que vous faites ? DANIEL KNAUF Heu, je suis en train de rechercher un ancien article. Je dois en écrire un autre sur un sujet similaire pour la prochaine édition. Frank utilise le clavier pour faire défiler les articles, comme le faisait Knauf quand il est rentré. Il s'arrête un instant sur une photo lors d'une inauguration de salle polyvalente. Le Shérif y figure avec sa femme, dans son tailleur beige. Quelques autres articles défilent. Il s'en affiche un sur la fin des travaux du commissariat, qui date de deux ans. Gros plan sur l'image pixelisée par l'écran de la femme du Shérif. Julia Belfaye y porte son éternel tailleur beige. Décidément trop éternel... Frank quitte précipitamment les lieux, sous le regard éberlué de Daniel Knauf. SEQUENCE 37 - DOMICILE DES BELFAYE - INT. JOUR Dans le couloir de l'étage, Frank avance vivement. Il passe tout droit devant la porte de sa chambre, et ouvre celle du Shérif et de son épouse. Là, il marque un temps d'arrêt, comme un peu gêné, l'espace d'une seconde, de ce qu'il s'apprête à faire. Puis, il se dirige, à nouveau déterminé, vers la penderie de Julia Belfaye. Il l'ouvre et nous faisons un gros plan sur son visage satisfait d'avoir obtenu la confirmation qu'il recherchait. Le contre-champ nous permet de découvrir à notre tour le contenu de cette penderie : Julia Belfaye ne possède que de multiples exemplaires de la même tenue, ce tailleur beige passe-partout qu'elle porte donc en permanence. FONDU AU NOIR ACTE 4 SEQUENCE 38 - DOMICILE DES BELFAYE - SUITE DE LA SEQUENCE 37 - INT. JOUR Retour sur l'image des tenues identiques alignées dans la penderie de Julia Belfaye. Frank est maintenant à la fois perplexe et en colère. Son portable se met soudain à sonner. FRANK Frank Black. PETER (OFF, TELEPHONE) C'est Peter. Où es-tu? FRANK Chez les Belfaye. PETER Comment ça? FRANK Je t'expliquerais. Il se passe quelque chose? PETER Oui. Nous venons d'avoir des nouvelles des agents du Shérif. Rejoins-nous au 12 Canal Street. FRANK Cette adresse correspond à quoi? PETER C'est le domicile de Marcus Franklin, la dernière victime. Frank fronce les sourcils mais ne répond pas. Finalement : FRANK J'arrive. SEQUENCE 39 - VOITURE DE FRANK - INT JOUR Frank est au volant. Il a posé son portable sur le tableau de bord et activé la fonction haut-parleur. On entend une sonnerie, puis Suzanne, depuis son bureau du Q.G. de Millennium. SUZANNE Frank? J'attendais justement de vos nouvelles. FRANK Je n'en doute pas SUZANNE (ressentant la colère de Frank) Que se passe-t-il? FRANK Vous m'avez menti. Une fois de plus, le Groupe a cherché à me manipuler. SUZANNE Pourquoi... FRANK (la coupant) Cessez ce jeu-là, Suzanne. Je ne suis pas un imbécile et je commence à être rompu à cet exercice. Vous saviez ce que cette affaire avait de particulier. Vous connaissiez le secret de ces gens! Vous ne me ferez pas croire que c'est par hasard que le Groupe avait un agent permanent sur place. SUZANNE (prenant une profonde inspiration) Frank... Vous vous méprenez. FRANK Vous allez me soutenir que vous n'étiez au courant de rien? SUZANNE Ce que je voudrais vous faire comprendre, Frank, c'est que... Vous faire part des suspicions du Groupe... Ca, cela aurait été vous manipuler. Frank ne peut contenir une sorte de rire nerveux. FRANK Suzanne! SUZANNE Bien sûr, le Groupe a des connaissances, suit certains phénomènes, étudie des communautés. Mais il le fait dans beaucoup de cas, Frank, et en étant rarement sûr de quoi que ce soit. Nous vous envoyons sur ces enquêtes vierge de ces informations parasites, parce que nous souhaitons qu'elles soient réalisées avec objectivité. FRANK Vous avez réponse à tout. SUZANNE Non, j'ai de nombreuses questions sans réponses, Frank. Je cherche juste à vous expliquer que ce que vous appelez manipulation, c'est la chose même qui fait de nous des enquêteurs, et non des fanatiques. Frank laisse passer un temps, ne trouve rien à répondre. FRANK Je vous rappellerai. SUZANNE Entendu, Frank. SEQUENCE 40 - DOMICILE DE MARCUS FRANKLIN - INT. JOUR Un Policier s'écarte pour laisser passer Frank. Depuis le salon, Peter remarque Frank et s'avance vers lui. PETER (dirigeant Frank vers une chambre à l'arrière de la maison) Les hommes du Shérif sont venus ici pour les recherches de routine sur la victime. Ils ont vite réalisé qu'il n'y avait rien de routinier. FRANK (impatient) Comment ça? Peter pousse la porte de la chambre que nous avons déjà vue plus tôt dans l'épisode. Sombre, sa fenêtre a été barricadée. Frank entre en fronçant les sourcils. Un agent est en train de sortir et référencer les outils de chirurgie basiques qu'utilisait le tueur. FRANK (se retournant vers Peter) C'est notre tueur! PETER Le premier du moins. Mais regarde ça. Peter désigne à Frank l'étagère où se trouve les boites ouvertes entassées. Frank s'approche. Immédiatement, il remarque que trois boites étaient présentes sur l'étagère du dessus, grâce au résidus de sang sur le bois qui en délimitent les contours. PETER Tu en penses quoi ? FRANK Ce qu'il y avait dans ces trois boites...c'est la cause des meurtres. Je pense qu'ils ont été prélevés dans le corps des victimes. PETER Mais il y en avait trois. Il a commis deux meurtres. FRANK L'accident de voiture, Peter. C'est ce qui a tout commencé. Ce Marcus Franklin était là. Je pense qu'il a voulu porter secours à la victime. Mais il a trouvé le premier de ces trois éléments. Et tout a commencé. Peter fait une moue et hoche la tête. PETER Je vois. FRANK Celui qui a tué Marcus Franklin convoitait le contenu de ces trois boites. Et il n'est pas le seul. PETER Tu penses au profanateur. Frank prend Peter par le bras et l'entraîne à l'écart de toute oreille indiscrète. FRANK Je pense à toute cette foutue ville, Peter. Il n'y a guère que le Shérif qui ne soit pas au courant. PETER Au courant de quoi ? FRANK Précisément, je l'ignore. Mais c'est lié à leurs coutumes de l'Egypte Antique. Tout à l'heure chez les Belfaye, je suis allé vérifier un soupçon. La femme du Shérif, elle n'a qu'une seule tenue, en plusieurs exemplaires. PETER (écarquillant les yeux) La coutume sous les pharaons voulait que les femmes ne portent qu'une tenue, et les hommes deux en tout. FRANK Et nous sommes face à une adaptation moderne de ces coutumes. PETER Et le Shérif ? FRANK Il l'a dit lui-même. C'est un étranger ici, dans une petite ville où aucun étranger ne s'intègre jamais vraiment. Je pense que sa femme l'a choisi. Ils souhaitaient un Shérif indépendant, qui ne soit pas impliqué dans leurs affaires, et qui ne puisse pas y mettre le nez. SEQUENCE 41 - BUREAUX DE LA PERMANENCE LOCALE DE 'PINEY WOODS NEWS' - INT. JOUR Daniel Knauf se dirige vers un placard qu'il ouvre avec une clef. A l'intérieur, se trouve une radio. Il prend un casque, le pose sur ses oreilles et allume l'appareil. On entend un souffle. Knauf fait un réglage sur un bouton. On commence à entendre des voix. POLICIER #1 (OFF, RADIO) Le Shérif est toujours pas dispo ? POLICIER #2 (OFF, RADIO) Non, il est chez Franklin. POLICIER #1 (OFF, RADIO) Qu'est-ce qui se passe ? POLICIER #2 (OFF, RADIO) C'était l'un des tueurs. POLICIER #1 (OFF, RADIO) On a retrouvé...? POLICIER #2 (OFF, RADIO) Non, celui qui l'a descendu les a récupérés. POLICIER #1 (OFF, RADIO) Quels enfoirés ! POLICIER #2 (OFF, RADIO) Ca sent pas bon. Les deux gars sont en train de mener le Shérif dans la bonne direction. Daniel Knauf coupe la radio et repose son casque. Il a l'air concentré et ennuyé. Il se lève très soudainement et commence à rassembler des papiers. Il ouvre un placard contre le mur du fond, en sort un dossier et se retourne pour le poser sur son bureau. Il fait alors face à SCOTT CHABERT, un homme d'une cinquantaine d'année marqué par un embonpoint certain et l'expression contrariée. Knauf reste sans bouger ni rien dire. CHABERT Je suis content de te voir toujours dynamique. La faiblesse de ton travail m'avait fait craindre le contraire. DANIEL KNAUF Qu'est-ce que vous...? CHABERT Me prends pas pour un con, Knauf. Crois-moi, j'ai autre chose à faire que de venir dans un trou comme celui-ci t'expliquer que pour une fois qu'il s'y passe quelque chose et que ton salaire est justifié, j'aimerais bien recevoir quelque chose de toi. DANIEL KNAUF L'enquête est en cours et... enfin, l'hystérie est à éviter, Monsieur Chabert. CHABERT Tu sais comme je m'en tape, de l'hystérie ? Je suis rédacteur en chef d'un journal, la seule chose qui m'intéresse c'est de sortir des infos et de vendre mon putain de canard ! Je suis pas là pour faire du social. Knauf se met soudain à regarder Chabert très fixement. DANIEL KNAUF (souriant) Monsieur Chabert, je crois que je vais avoir du sensationnel pour la une de Piney Woods News. Un autre instant de calme puis Knauf sort du champ en se précipitant sur Chabert. Off, on entend des coups sourds et le cri d'agonie de l'homme. SEQUENCE 42 - PERMANENCE LOCALE DE 'PINEY WOODS NEWS' - PLUSIEURS MINUTES PLUS TARD - INT. JOUR Gros plan sur un ignoble bibelot d'art moderne en métal, tâché de sang, dans la main de Daniel Knauf. Il repose l'arme du crime sur le sol. La caméra remonte vers son visage. Knauf est essoufflé. Il se redresse quelque peu, s'appuyant au passage de la main sur sa victime. Ses sourcils se froncent. On le voit observer le corps un instant, dont on ne peut qu'entrevoir le visage défiguré par les coups. Daniel Knauf sort de la poche de sa chemise un stylo. On le voit le planter dans l'abdomen de Chabert. D'après un gros plan de son visage, on devine qu'il ouvre l'organisme de l'homme, écartant les chairs. Il y plonge les mains, explore la cavité abdominale... Un plan de l'abdomen nous montre Knauf en ressortir un objet de forme ovoïde, d'un noir translucide. DANIEL KNAUF J'ai juste besoin d'y croire. Il suffit que j'y croie ! SEQUENCE 43 - COUR ARRIERE DU RESTAURANT ''CHEZ MOLLIE'' - EXT. JOUR Frank est de retour sur les lieux. Il inspecte minutieusement les environs, à la recherche d'un indice qui aurait pu échapper à la vigilance des agents de Police. Quelque chose qui le mette sur la piste du nouveau tueur. Son portable se met soudain à sonner. FRANK (décrochant) Frank Black... Allô ? C'est Julia Belfaye qui appelle Frank. Elle est revenue chez elle. JULIA Monsieur Black... Ici Julia Belfaye. FRANK Madame Belfaye... Qu'est-ce que vous vouliez ? JULIA Je... Je dois vous parler, Monsieur Black. FRANK Très bien. Il aurait sûrement été préférable que vous le fassiez avant. JULIA (après un temps) Vous pouvez venir me retrouver à la maison ? SEQUENCE 44 – DOMICILE DES BELFAYE – INT. JOUR Frank frappe un coup à la porte, et entre sans attendre. Il arrive dans le salon, où Julia l'attend, assise dans un fauteuil, figée. FRANK Madame Belfaye. JULIA Monsieur Black... Il faut arrêter tout ça. Il faut... J'avais tellement d'espoirs, Monsieur Black. Tellement d'espoirs ! VUE SUR la porte de la maison qui commence à s'ouvrir. Mais le mouvement s'arrête quand la personne entend des voix à l'intérieur. Dans l'entrebâillement, la caméra qui se rapproche nous fait découvrir Peter Watts, épiant. FRANK (OFF SUR L'IMAGE DE PETER) Il va d'abord falloir que vous me racontiez toute l'histoire, Madame Belfaye. Toute la vérité depuis le commencement, depuis les frères Galveston. RETOUR sur le visage de Julia, surprise. JULIA Ce qui est important, c'est d'arrêter ces hommes. FRANK Qui ?... Dites-moi qui. JULIA Je sais qui a profané les tombes du cimetière. Mais il n'a assassiné personne. Il attendait, comme moi, l'avènement du Maât éternel, l'Horus spirituel. Mais il a estimé qu'il ne pouvait pas le laisser tomber en d'autres mains qui pourraient le corrompre. FRANK Qui est-ce, Julia ? JULIA Arthur Jacobs, le médecin de la ville. ANGLE sur Peter Watts, qui disparaît alors qu'il referme la porte de la maison des Belfaye. SEQUENCE 45 – RUE DEVANT CHEZ LES BELFAYE – EXT. JOUR Peter Watts tourne les talons et se retourne vers sa propre voiture de location. Il désactive l'alarme à distance, ouvre la porte et s'apprête à y rentrer. Mais : DANIEL KNAUF Monsieur Watts ! Peter se retourne. Daniel Knauf vient de sortir de sa propre voiture, garée 15 mètres plus loin. Il l'a interpellé en se dirigeant vers lui. PETER Vous êtes ? DANIEL KNAUF Daniel Knauf, correspondant local du Piney Woods News. PETER (hochant sombrement la tête) Et agent local du Groupe. DANIEL KNAUF Oui... A ce titre, je crois pouvoir dire que je sais comme vous ce qui est à l'œuvre ici. Et ce qui pourrait être en jeu. PETER Ce qui veut dire ? DANIEL KNAUF Frank Black est un excellent enquêteur, peut-être le meilleur. C'est aussi un homme d'avenir. Mais il n'est qu'un simple candidat. Il n'a qu'une conscience relative des ambitions du Groupe et de leur portée. PETER Qu'est-ce que vous voulez ? DANIEL KNAUF Associons-nous le temps de conclure cette affaire, Peter. Vous savez tout le bien qu'il y a à en retirer. SEQUENCE 46 – BUREAU DU SHERIF – EXT. JOUR Frank gare sa voiture de location devant le bureau. Julia Belfaye se trouve sur le siège passager. Ils en sortent ensemble et montent les marches vers l'entrée. SEQUENCE 47 – BUREAU DU SHERIF – INT. JOUR Le Shérif entend le bruit de la porte qui se referme et se retourne. Il découvre Julia et Frank. SHERIF BELFAYE Julia ? Qu'est-ce qui... FRANK (L'interrompant) Shérif, votre épouse tient à témoigner de ce qu'elle sait de cette affaire. Ce qui devrait nous permettre de bien avancer dans sa résolution. SHERIF BELFAYE Je ne comprends pas. FRANK Moi non plus. Pas encore. Mais tout ne tardera pas à s'éclaircir, maintenant. N'est-ce pas Madame ? SHERIF BELFAYE (Incrédule) Tu savais ? JULIA Je ne sais pas qui tue, non. Mais je sais pourquoi. Tout le monde ici le sait. Tout le monde espérait que cela s'arrêterait. Mais une fois la spirale amorcée... Je sais que c'est Arthur qui... est allé au cimetière. Il me l'a avoué ce matin. Le Shérif, atterré, s'assoit derrière son bureau. Il passe sa main dans ses cheveux. SHERIF BELFAYE Mes hommes... Mes hommes, ils... FRANK Les seuls à ne pas être dans la confidence, Shérif, c'étaient vous, O'Maley et Daniel Knauf. Mais je crois que celui-ci avait tout de même une bonne idée de ce qui se passait. Il est venu ici pour ça. SHERIF BELFAYE Mais... Comment ? Pourquoi ? FRANK Vous me l'avez en partie expliqué, Shérif. Tout remonte à la fondation de Galveston. Tout remonte à Jayce et Virgil Galveston, à la communauté qu'ils ont voulu construire. JULIA Ils sont le début de l'histoire. Horald Galveston, le fils de Jayce, est celui qui a compris le lien qu'il partageait avec l'histoire, et son rôle dans celle-ci. Le portable de Frank se met soudain à sonner. FRANK (décrochant) Excusez-moi. SEQUENCE 48 – QG DE MILLENNIUM - BUREAU DE SUZANNE – INT. JOUR (S'entrecoupe avec la séquence 47 au fil de la conversation) SUZANNE Frank ? FRANK Oui. SUZANNE Il fallait que je vous demande... Depuis ce matin, je n'arrive plus à contacter l'agent local du Groupe... Est-ce que vous êtes avec lui ? FRANK J'ai vu Daniel Knauf ce matin, au bureau du journal. SUZANNE Il ne répond pas au téléphone. Il participe à l'enquête ? FRANK Non, il a continué de se tenir à l'écart. Ce matin, il... Frank s'interrompt. Il réfléchit à ce qu'il a vu, ce qu'il sait, ce qu'il peut soupçonner, et les pièces s'emboîtent soudain. FRANK Suzanne, je l'ai trouvé en train de consulter des vieux articles. Il cherchait d'autres habitants liés à la rivière. Il... Suzanne, c'est lui le second tueur. (Sans lui laisser le temps de répondre :) Je vous rappellerai. Frank remet son téléphone dans sa poche. FRANK Shérif, il faut que vous arrêtiez Knauf. SEQUENCE 49 – BUREAU DE PINEY WOODS NEWS – INT. JOUR La caméra filme un plan de la porte, sur laquelle on frappe depuis l'extérieur. Plusieurs coups puissants. La caméra fait un lent TRAVELING ARRIERE. SHERIF BELFAYE (OFF) Daniel! Daniel ouvre cette porte ! Il finit par donner un coup de pied de rage dans cette porte. SHERIF BELFAYE Bon sang, Daniel! Je sais ce qu'il se passe. Julia a parlé. Il faut que tu me parles aussi. Que tu me dises ton rôle dans tout ça. Un autre temps de silence. SHERIF BELFAYE Je te préviens, je te laisse cinq secondes pour m'ouvrir. Après ça, je vais entrer. Je me fiche pas mal d'avoir un mandat ou pas. A l'instant où Belfaye pousse finalement la porte, le travelling nous fait découvrir le corps de Scott Chabert qui repose toujours sur le sol. Eventré. Belfaye reste prostré dans l'entrée. Il secoue lentement la tête. SEQUENCE 50 – DOMICILE DU DR. JACOBS – INT. JOUR Peter et Daniel Knauf poussent la porte de la maison. Knauf s'avance rapidement et commence à fouiller la maison. DANIEL KNAUF Vous êtes sûr que c'est lui qui a ouvert les tombes du cimetière ? PETER Oui. Peter se met lui aussi à fouiller la pièce. JULIA (OFF) A une époque, l'Egypte était séparée en deux royaumes. L'un était dirigé par Seth. L'autre l'était par son frère, Osiris. L'ambition de Seth le poussa à tenter d'éliminer Osiris. Après avoir été une première fois mis en échec par la magie d'Isis, l'épouse d'Osiris, Seth fit découper le corps de son frère en 14 morceaux, qu'il dispersa dans le Delta du Nil. SEQUENCE 51 – BUREAU DU SHERIF – INT. JOUR Frank et Julia sont assis autour du bureau du Shérif. JULIA (CONTINUANT) La quatorzième partie, son phallus, fut dévorée par l'oxyrinthe. Julia remarque le regard interrogatif de Frank. JULIA (expliquant) Un poisson. Isis se lança alors dans la quête des 13 parties de son époux, réparties dans les marais et la rivière. Elle y parvint. Sa magie lui permit de réanimer Osiris le temps de concevoir un enfant, Horus, qui serait élevé en secret dans les marais du Delta. DANIEL KNAUF (OFF) Ils sont là ! SEQUENCE 52 – CHAMBRE DU DR. JACOBS – INT. JOUR Gros plan sur le visage halluciné de Knauf, les yeux écarquillés. Dans un tiroir devant lui, se trouvent les 6 œufs extraits des corps des tombes par Arthur Jacobs. SEQUENCE 53 – SALON DU DR. JACOBS – INT. JOUR Peter lève la tête vers l'étage, d'où il a entendu venir la voix de Knauf. PETER Qu'est-ce que vous avez dit ? Vous les avez ? Pas de réponse. Peter commence à monter les escaliers. JULIA (OFF) Des années plus tard, Horus défia son oncle Seth et fut son vainqueur. Il devint ainsi le premier Pharaon d'une Egypte unifiée. SEQUENCE 54 – DOMICILE DU DR. GALVESTON – ETAGE – INT. JOUR Peter Watts arrive en haut des escaliers. PETER Daniel ? FRANK (OFF) Le parallèle avec Horald Galveston, son père et son oncle est facile. Mais ce qui s'est passé entre ces hommes est assez banal. Pas de quoi donner corps à tant de croyances, à une telle communauté. Peter franchit le seuil de la chambre Daniel Knauf, en embuscade, l'assomme violemment. SEQUENCE 55 – BUREAU DU SHERIF – INT. JOUR Retour sur Julia Belfaye, au regard halluciné et brillant. JULIA C'est ce que vous pensez, parce que vous ignorez tous les détails, tous les faits, toute la portée de l'histoire. Quand ils ont décidé de fonder cette ville, les frères Galveston revenaient d'Egypte. Ils ont séjourné près de deux ans dans le Delta du Nil, où ils ont étudié les enseignement d'Isis et Osiris au peuple d'Egypte. Ils ont appris aux hommes l'agriculture, le respect des Dieux, et Maât. L'Ordre Universel. Julia détache le pendentif qui pendait à son cou, caché derrière ses vêtements beige, et le tend à Frank. Sur le médaillon, Frank découvre une divinité Egyptienne, frêle jeune femme représentée assise et coiffée d'une plume d'autruche. JULIA Maât, l'Ordre Universel, la justice et la vérité. Le monde a été créé en conformité avec Maât. Les rites servent à le maintenir face aux forces du Mal. SEQUENCE 56 – CHAMBRE DE JACOBS – INT. JOUR Peter est toujours étendu sur le sol. Daniel Knauf soulève délicatement les œufs noirs du tiroir, et les place dans un sac aux cotés de ceux qu'il a prélevé dans les corps de Scott Chabert et Marcus Franklin et de ceux que ce dernier avait lui-même extrait de ces victimes. Soudain, Arthur Jacobs apparaît dans l'embrasure de la porte. DR. JACOBS Non ! Il se précipite sauvagement sur Daniel Knauf. Fondu enchaîné sur : SEQUENCE 57 – BUREAU DU SHERIF – INT. JOUR DR. JACOBS (OFF) Ahhhhh! Son cri de rage et de douleur se dissipe peu à peu sur l'image du visage de Julia, qui marque une courte pose. JULIA (reprenant) Jayce et Virgil Galveston on trouvé quelque chose dans le delta du Nil. Une relique. Un objet mystique chargé d'histoire. Un témoignage du passé. Une source de sagesse qui leur a fait fonder cette ville une fois revenus au pays. Un objet de pouvoir qui a créé leur histoire, influençant leur psyché, recréant l'Histoire. FRANK Qu'est-il devenu ? JULIA Horald Galveston a compris son rôle. Sa volonté. Il a su ce qu'il fallait faire. Il l'a détruit. Treize fragments répartis autour de la rivière, destinés à réapparaître. FRANK Par le meurtre? SEQUENCE 58 – CHAMBRE DU DR. JACOBS – INT. JOUR Un plan sombre du visage de Peter revenant lentement à la conscience. Ses paupières clignent plusieurs fois avant que ses yeux ne restent finalement ouverts. JULIA (OFF) Non ! Les choses n'étaient pas supposer se passer comme ça. La violence est contraire à Maât. Elle le remet en cause, le menace. POINT DE VUE DE PETER : Une image floue. Une silhouette penchée sur une autre, immobile, qui n'est rien d'autre qu'un cadavre. JULIA (OFF, CONTINUANT) Nous aurions du attendre. Ils seraient apparus d'eux mêmes, au bon moment. J'espère que tout ceci ne remettra pas leur pouvoir en cause. Je l'espère tellement. En quelques secondes, l'image se précise, s'éclaircit, se révèle dans son horreur. Daniel Knauf est penché sur le corps du Docteur Jacobs. Une fois de plus il a utilisé un stylo pour percer sa peau. Celui-ci repose maintenant sur le sol, à coté de lui, imbibant de rouge la moquette grise. Daniel Knauf est en train d'ouvrir sa victime. Peter entreprend de se redresser lentement. Mais il s'affaisse sur le sol, à nouveau inconscient. L'ECRAN DEVIENT TOTALEMENT NOIR. Le bruit d'un coup de feu. L'image des yeux de Peter qui s'ouvrent. Le Shérif Belfaye et Daniel Knauf luttent, l'arme du Shérif entre eux deux. Le coup a été tiré en l'air. Knauf prend un peu d'écart, et balance un crochet du droit au Shérif. L'arme leur échappe des mains, et est éjectée sur le coté. Vers Peter. Peter tend le bras pour l'attraper avant que Knauf ne le fasse et qu'il puisse les tuer tous les deux. Tandis qu'il s'en saisit, Knauf se précipite vers lui. Le Shérif Belfaye court à son tour, pour arrêter Knauf. Peter tire. Daniel Knauf était quasiment arrivé sur lui, le coup a été tiré à bout portant, si bien qu'elle traverse le corps de Knauf et vient se loger dans celui de Belfaye. Les deux hommes s'effondrent. PETER Shérif ! A moitié en rampant, il se dirige vers le Shérif. Il a été touché en pleine poitrine. Il est mort. Peter passe sa main sur son crâne. Il se retourne vers Knauf. Son corps, éjecté vers l'arrière par le choc, repose non loin de celui de Jacobs. Sa tête à proximité de l'objet en forme d'œuf, ensanglanté. FRANK (OFF) Leur pouvoir ? SEQUENCE 59 – BUREAU DU SHERIF – INT. JOUR JULIA Comme les parties rassemblées par Isis de son époux ont permis la naissance d'un fils, les treize nouveaux éléments vont accoucher d'un nouvel Horus, spirituel celui-là. Un Maât renouvelé, renforcé. Une ère de paix pour le Monde. FRANK (décontenancé) C'est ce que veulent ces tueurs ? Julia hoche la tête en guise de réponse. FRANK (secouant la tête) Ils veulent une ère de paix pour le monde... SEQUENCE 60 – AEROPORT DE SEATTLE – INT. JOUR Suzanne McCarlton est dans la file d'attente pour acheter un billet de départ immédiat. Son portable se met soudain à sonner. SUZANNE Allô. PETER (OFF, au téléphone) Tout est terminé. SUZANNE (après un silence) Peter ? SEQUENCE 61 – MARAIS DE GALVESTON – EXT. JOUR (Durant cette conversation téléphonique, nous alternons entre les décors des séquence 60 et 61 au gré de la discussion.) Peter se trouve dans un marais verdoyant et humide. Mais il est filmé en gros plan, et on ne voit pas devant quoi il se tient. SUZANNE (OFF) Où êtes-vous ? PETER Je suis revenu au commencement. C'est là qu'Horus est né une première fois. C'est ici qu'il est censé renaître. SUZANNE Peter, je ne comprends pas. PETER L'affaire est terminée. Daniel Knauf est mort. Le Shérif est mort. Et les 13 éléments sont en ma possession. Suzanne écarquille les yeux. Elle regarde autour d'elle, et décide de quitter la file d'attente. SUZANNE Peter, il est important que le Groupe... PETER Non, Suzanne. Le Groupe n'a pas de légitimité pour ça. SUZANNE Et vous, vous l'avez ? PETER Plus que le Groupe. SUZANNE Vous mentez sans vergogne à votre seul ami. PETER Parce qu'il le faut. Et parce que je sais que je peux compter sur vous pour qu'il n'en sache rien. Le Groupe m'a tout appris sur les compromissions et les petits secrets. SUZANNE Rejeter la responsabilité de ce que vous avez fait et de ce que vous êtes devenu sur le Groupe, c'est bien facile, Peter. PETER Non, ce qui serait facile, ce serait de nier ma responsabilité individuelle, et de m'en remettre encore à des bergers mal avisés. Suzanne soupire. SUZANNE Peter... Vous tenez entre vos mains un espoir considérable. Ne le gâchez pas. PETER Je n'en ai pas la moindre intention. SUZANNE Dites-moi où vous êtes. Pendant la réplique suivante, la caméra s'éloigne de Peter en pivotant, et révèle devant lui, perdue en plein marais, la tombe d'Horald Galveston. PETER Au seul endroit logique. Une fois que j'ai réalisé qu'Horald Galveston n'était pas enterré dans le cimetière de la ville, je n'ai plus eu qu'à remonter jusqu'à lui. Evidemment, j'aurais du pouvoir le deviner depuis le début. Je tenais à vous prévenir, Suzanne, à ce que vous sachiez...que votre agent local a commis des meurtres, qu'il était celui qui pouvait mettre en danger l'espoir dont vous me parliez. Sans un mot de plus, il raccroche. Il s'avance vers la tombe et nous découvrons à sa base un interstice en partis caché par les herbes sauvages. Un trou rond juste assez grand pour y glisser les treize éléments ovoïdes. Par un long fondu enchaîné, le visage illuminé de Peter se dissous sur : SEQUENCE 62 – CHEROKEE ROUGE DE FRANK, SEATTLE, INT. JOUR Frank conduit silencieusement sa voiture. Peter est assis à coté de lui. Frank le ramène chez lui depuis l'aéroport. FRANK (OFF) L'affaire de Galveston s'est résolue par un mystère. Peter a expliqué avoir rencontré le Shérif Belfaye au bureau de rédaction de Daniel Knauf. Ils se sont rendus ensemble au domicile du Dr. Jacobs grâce aux informations que Belfaye venait d'apprendre de son épouse. Là, ils sont trouvé le Docteur déjà mort, et ont été surpris par une attaque de Knauf. Blessé, Peter a réussi à le tuer, atteignant également le Shérif, avant de sombrer dans l'inconscience. Frank arrive devant la maison des Watts et se gare. Peter déscend de la voiture et les deux hommes se saluent avant que Frank ne redémarre. La caméra laisse s'éloigner la Jeep de Frank, et filme Peter Watts qui marche vers sa maison. FRANK (OFF) Peter n'a donc jamais su qui était arrivé sur place pour dérober les treize éléments, dont le dernier qu'il a extrait du corps de Daniel Knauf. Cette affaire était-elle l'expression d'une mystique ancienne ? Ou bien la fumisterie intégrale de deux voyageurs cultivés, prêts à toutes les mises en scène pour créer la communauté de leur utopie ? Nous passons maintenant à un gros plan de face de Peter. FRANK (OFF) Un seul homme, cet inconnu, possède la clef de l'énigme. Sur l'image de Peter qui continue d'avancer le visage fermé : FONDU AU NOIR. FIN